Environnement : le thon rouge contraint de faire confiance aux pêcheurs
Infographie AFP
Après la décision de la CITES de ne pas placer l'espèce sous sa protection, la gestion du thon rouge d'Atlantique-Est reste entre les mains d'une organisation professionnelle de pêche accusée d'avoir échoué à maintenir une population en bon état.
La conférence de la Convention sur le commerce international des espèces sauvages menacées d'extinction (CITES), réunie à Doha, a refusé jeudi d'inscrire le «Thunnus Thynnus» à son Annexe I, qui en aurait interdit les exportations.
C'est donc à l'ICCAT, la Commission internationale pour la conservation des thonidés de l'Atlantique (et de Méditerranée), qui réunit une cinquantaine de pays pêcheurs, qu'échoit la responsabilité de cette population.
«Si nous proposons l'inscription du thon rouge à l'Annexe I, c'est que nous avons atteint un niveau où l'effondrement du stock est inéluctable», avait expliqué avant le vote de jeudi le représentant de Monaco Patrick Van Klaveren.
«Le Comité scientifique de l'ICCAT a recommandé un taux autorisé de capture (TAC) de 8.000 tonnes pour 2010 pour garder une chance sur deux de reconstituer le stock d'ici 10 ans. Ca n'a pas empêché la Commission d'autoriser 13.500 tonnes», avait-il souligné.
En 2007, le TAC atteignait encore 28.000 tonnes, mais la pêche illicite avait multiplié les ponctions par trois, remarquait-il, faisant valoir que l'Union européenne dispose d'une surcapacité de pêche de 28.000 tonnes à elle seule --elle s'est d'ailleurs abstenue jeudi-- et que celle de la flotte turque dépassait de «300% ses quotas».
De son côté, l'ICCAT, présente à Doha, a défendu son bilan: «En dix ans, nous avons réduit les TAC de 58% et nous visons une réduction de 25% des capacités», a expliqué son président Fabio Hazin.
En novembre, la Commission avait annoncé le renforcement des mesures de suivi et de contrôle pour les pêcheries de thon rouge, reconnaissant une «surpêche considérable notamment en Méditerranée».
Toute l'industrie accourue à Doha a répété ces promesses au cours de la semaine: «Notre objectif est de conserver du thon rouge pour les trois prochaines décennies. Nous n'avons aucun intérêt à sa disparition», jurait Maron Kristofersson, responsable de fermes d'engraissement en Islande.
Mais la méfiance envers l'ICCAT remonte à 1992 quand, sous la pression du Japon, une proposition suédoise d'inscrire le thon rouge à la CITES avait été retoquée.
«L'ICCAT a fait un travail épouvantable ces 20 dernières années: la conférence a choisi une institution qui a échoué. Quand quelque chose ne marche pas, il faut choisir un meilleur outil. Ce devait être la CITES», a réagi Gerry Leape, expert du Pew Environmnent Group.
«L'espoir était qu'ICCAT et CITES travaillent ensemble. Le commerce international est la principale incitation à la surpêche», a pour sa part expliqué le Dr Sergi Tudela, expert des pêches en Méditerranée pour le WWF.
Mais le Japon, qui consomme 80% du thon rouge de Méditerranée et a entraîné de nombreux pays du Sud, ne voulait pas de la CITES: «Il faut des mesures capables de couvrir l'ensemble du processus, de la pêche au commerce: sinon c'est injuste: pour les pays en développement, l'exportation seule garantit la viabilité des pêches», a expliqué son délégué Masanori Miyahara, responsable des pêcheries japonaises auprès de l'ICCAT.
«La critique (de l'ICCAT) est légitime», mais cette institution «a changé», a-t-il plaidé, reconnaissant une forme de «pression» exercée par la résolution de Monaco.
«Au moins, notre proposition a brandi une menace: la majorité des pays ont demandé des mesures énergiques. On prend note», s'est consolé M. Van Klaveren.
Le débat va reprendre dès dimanche, alors que la CITES est saisie de propositions pour quatre espèces de requins recherchées pour leurs ailerons sur le marché asiatique.
source: lepays.com
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire